Bien qu’on ne le soupçonne pas, les traitements anticancéreux affectent la bouche et ses différents composants.
La chimiothérapie
Née dans les années 1940, la chimiothérapie est un traitement chimique qui détruit les cellules cancéreuses en s’attaquant à des molécules spécifiques, responsables de la croissance des colonies de cellules cancéreuses.
Elle s’administre de façon préventive, pour prévenir l’infection et ses conséquences, ou curative, pour baisser l’état d’avancement du cancer.
Ce traitement s’administre de différentes manières :
• par voie orale (prise d’un médicament),
• par intraveineuse (pose d’un cathéter dans les veines),
• par chambre sous-dermique (pose d’un petit boîtier et d’un cathéter sous la peau, placé au niveau du thorax).
La chimiothérapie est un bulldozer qui touche de façon efficace les mauvaises cellules. Bien que son effet soit heureusement limité auprès des cellules saines, le traitement perturbe aussi leur multiplication, avec des conséquences bucco-dentaires.
On observe notamment :
• Des douleurs au niveau des dents ou des gencives.
• Une diminution de la salivation, ce qui engendre une sécheresse buccale. Au quotidien, les effets sont directs : difficulté à avaler sa salive ; altération de l’état de surface de l’émail, qui devient plus transparent. Moins bien protégées, vos dents s’exposent ainsi à un plus grand risque carieux.
• Des plaies au niveau des muqueuses (langue, joues) ainsi que des lésions aux gencives (ulcères, aphtes…).
• Une limitation des mouvements articulaires de la mâchoire qui donne une impression de paralysie. Parler, mâcher ou bailler devient inconfortable. Ce désagrément disparaîtra après le traitement.
• Des vomissements dont l’acidité provenant de l’estomac, peut rendre poreuse la surface de vos dents. Pensez à bien rincer votre bouche à l’eau claire à chaque occasion.
• Une altération du goût, avec une sensation métallique dans la bouche.
Les bisphosphonates
Le traitement par bisphosphonates, qui est une forme de chimiothérapie, ralentit la résorption osseuse. Ces molécules sont, aujourd’hui, souvent administrées aux femmes touchées par l’ostéoporose, notamment après la ménopause.
Ces molécules atténuent la douleur causée par les cancers osseux, réduisent le risque de fracture, mais peuvent provoquer une ulcération osseuse grave, l’ostéonécrose, par perte des facultés de réparation et de cicatrisation.
Certains traitements dentaires chirurgicaux comme les extractions, les élongations coronaires (abaissement de la gencive pour fair ressortir la racine), les détartrages profonds deviennent alors contre-indiqués ou réalisables dans des conditions d’asepsie et d’antibiothérapie lourdes, en milieu hospitalier.
La radiothérapie
Les prémices de la radiothérapie date de la fin du 19è siècle. Grâce à un rayonnement ionisant très ciblé, elle détruit les cellules cancéreuses en les empêchant de se multiplier.
La radiothérapie présente tout de même différents effets néfastes sur votre sourire et votre santé bucco-dentaire.
Dans le champs d’irradiation, le traitement va :
• Stériliser les glandes salivaires. La bouche devient sèche. Là aussi, la salive n’assure plus son rôle de protection et de lubrification.
• Provoquer des plaies sur les muqueuses
• Limiter l’ouverture de l’articulation prise dans le champ d’irradiation.
• Brûler les petits vaisseaux sanguins des muqueuses et de l’os, qui perdent leur faculté de cicatrisation.
Les conduites à tenir
Avant le traitement :
Faire réaliser un contrôle poussé par son chirurgien-dentiste et les soins nécessaires (détartrage, caries, extractions), pour éviter urgence et infection pendant le traitement. Une dent litigieuse ne peut pas être conservée sauf à prendre un risque futur.
Pendant le traitement :
La surveillance doit être régulière, l’hygiène extrêmement rigoureuse, l’alimentation adaptée, notamment par une franche réduction des sucres rapides dont se nourrissent les cellules cancéreuses (1).
Si la salive naturelle vient à manquer, rendez-vous en pharmacie. Des gels ou des sprays adaptés apportent un confort dans le quotidien.
On supprimera le tabac et l’alcool, dont la consommation conjointe est à l’origine de cancers de la muqueuse buccale.
Si une extraction devait être nécessaire, un protocole spécifique en milieu hospitalier est requis pour éviter l’ostéonécrose.
Les risques sont faibles voire inexistants pour les soins courants (détartrage, soins de caries…)
Après le traitement :
Des solides et saines habitudes hygiéno-diététiques doivent désormais faire partie du quotidien, avec deux objectifs : faire chuter le risque de rencontrer des problèmes et aider l’organisme à se refaire une santé.
Les dents peuvent-être protégées par une gouttière de fluoration pour limiter le risque carieux.
Les vernis fluorés, utilisés dans la bouche des enfants, n’ont pas fait leurs preuves chez les patients irradiés et présentent même des contre-indications en cas d’inflammation des muqueuses ou d’ulcérations (2).
Cet article vous est proposé par le Dr François Thibault.
Découvrez le dernier article du praticien sur le blanchiment dentaire !
Dr François Thibault, chirurgien-dentiste, consultant en prévention bucco-dentaire et créateur du site www.preventissimo.fr.
« J’informe, je vulgarise, je sensibilise, je forme à la santé et au bien-être bucco-dentaire. Pour une prévention efficace et choisie ! »
Références bibliographiques
(1) C. Debras, et al – Total and added sugar intakes, sugar types, and cancer risk: results from the prospective NutriNet-Santé cohort; American Journal od Clinical Nutrition – 16 septembre 2020
(2) C. Cardot – Effets de la radiothérapie sur les structures dentaires : utilisation de deux vernis fluorés: étude expérimentale. Sciences du Vivant [q-bio] – 2019.