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Dans la peau du radiologue – Cas n°3 : Un kyste asymptomatique chez une jeune adolescente

Imagerie Par Norbert BELLAICHE le 21-06-2017

En début de mois, Norbert Bellaiche vous présentait son troisième cas et vous proposait de vous mettre dans la peau d’un radiologue en vous exerçant au diagnostic d’un Cone Beam. Quel diagnostic aviez-vous décelé ? Découvrez toutes les corrections plus bas !

CLINIQUE : Patiente de 14 ans. Asymptomatique. Découverte fortuite sur une panoramique dentaire d’un kyste mandibulaire antérieur de 12 mm de grand axe. Absence de notion de traumatisme récent  ou de l’enfance. Tests de vitalité des dents du bloc incisivo- canin mandibulaire positifs. (Patiente du Dr Jean-Luc Charrier).

CAS N°3

1. Comment décririez-vous ce kyste ?
– Unique ou multiple ?
– Comprenant des calcifications ou non ?
– A limites régulières ou irrégulières ?
– Entouré d’une paroi ou non ?
– Responsable d’une lyse corticale ou non ?
– Centré par un apex ou plusieurs ?
– Résorbant les apex ou non ?
2. Quels sont les diagnostics envisageables et quel est celui que vous proposeriez en premier lieu ?
3. Quelle attitude diagnostique et thérapeutique envisagez-vous ?


DÉCOUVREZ LES RÉPONSES :
1. Kyste :
– Unique,
– Sans calcification en son sein,
– À limites régulières,
– Sans paroi individualisable,
– Soufflant la corticale vestibulaire,
– Centré par les apex de 11 et 21,
– Qui ne sont pas résorbés.

2. Les diagnostics envisageables chez cette adolescente, compte tenu de la clinique sont :
– Un kyste solitaire (ou essentiel). En faveur : les éléments cliniques (terrain, absence de traumatisme et de symptôme, dents vivantes) et les signes radiologiques : « kyste » sans paroi ni calcification, se développant à l’aplomb des incisives mandibulaires et s’invaginant entre les apex ;
– Une lésion d’origine endodontique (kyste radiculodentaire ou latéral) s’accompagne d’une nécrose pulpaire ;
– De même, un kyste traumatique vrai (même sans notion connue de traumatisme) est consécutif à une nécrose pulpaire secondaire au traumatisme ;
– Une tumeur odontogène kératokystique (ou kératokyste) : dans ce cas, le patient est typiquement plus âgé, la lésion plus volumineuse et une résorption apicale est possible, bien qu’inconstante ; cependant le diagnostic peut se voir chez l’enfant et l’adolescent et le kératokyste peut aussi être de petite taille ; dans le doute l’abord chirurgical permet de distinguer les lésions, au besoin par histologie.
– Une dysplasie (cémento-) osseuse au stade I, donne une formation apicale en général moins volumineuse, soufflant peu ou pas les corticales et se révélant  en général plus tard ;
– D’autres diagnostics pourraient être évoqués dans certaines conditions : améloblastome unikystique, plus agressif, de diagnostic parfois seulement histologique ; granulome à cellules géantes et kyste anévrysmal dans leur  forme de petite taille, de diagnostic histologique aussi : association de cellules géantes et de fibroblastes.
Le diagnostic de kyste solitaire est donc proposé en premier lieu pour les raisons sus-décrites.

3. L’attitude diagnostique et thérapeutique habituelle est la simple ouverture du « kyste » par trépanation vestibulaire et son curetage. Mais dans ce cas de survenue au cours de la deuxième décade du patient, l’os étant en pleine croissance, certains ont proposé de s’abstenir et de simplement surveiller l’évolution de la lésion. Ceci a été la décision du praticien (Dr Jean-Luc Charrier). L’évolution s’est caractérisée par une diminution progressive ayant abouti à la disparition totale de la formation « kystique » au terme de deux ans d’évolution (Figure 2).


Fig. 2


DISCUSSION
Le KYSTE OSSEUX SOLITAIRE comporte de nombreuses dénominations : kyste essentiel, kyste «hémorragique » ou hématique, kyste idiopathique,  kyste osseux « traumatique », cavité osseuse progressive, ostéodystrophie kystique, évoquant  les incertitudes quant à sa nature et son étiologie.

• Il est en général de découverte radiologique fortuite, sans antécédents traumatique facial, rarement à l’occasion d’une tension douloureuse locale, chez un enfant ou un adolescent (le plus souvent au cours de la deuxième décade), mais il peut aussi se voir chez des patients plus âgés.
Les tests de vitalité dentaire sont positifs.

• Signes radiologiques (mieux définis par cone beam).
C’est  typiquement une lacune purement liquidienne, sans calcification, plus ou moins bien limitée, volontiers festonnée ou de forme triangulaire à sommet supérieur, entre les apex d’une symphyse mandibulaire, parfois de siège prémolomolaire ou plus postérieur,
– le plus souvent solitaire, de taille limitée, rarement multiple et/ou de grande taille,
amincissant ou soufflant les corticales, surtout vestibulaire,
sans résorption apicale des dents adjacentes,
– associée à de fines cloisons osseuses dans 1/3 des cas et rarement plus ou moins opaque.

• L’ouverture de la lésion trouve une cavité vide ou remplie d’un liquide séreux ou faiblement hémorragique sans revêtement épithélial (il s’agit donc d’un pseudo- kyste ou d’un faux kyste).
Le curetage des parois par grattage simple permet la guérison en 6 à 24 mois, le plus souvent sans récidive. Chez l’enfant et l’adolescent, une simple surveillance clinique et radiologique peut aboutir à le restitutio ad integrum en un à deux ans.


POUR EN SAVOIR PLUS :
1. BELLAICHE N. Guide pratique du cone beam en imagerie dento-maxillaire. Editions CdP, 2016. 
2. COPETTE MA, KAWAMATA A, LANGLAIS RP. Solitary bone cyst of the jaws: radiographic review of 44 cases. Oral Surg oral Med Oral Pathol Radiol Endod 1998; 85(2): 221-5.
3. DUBRULLE F, MARTIN-DUVERNEUIL N, MOULIN G. Imagerie en ORL. Elsevier Masson, 2010.
4. HARNET JC, FEKI A, LOMBARDI T. Kyste osseux solitaire des maxillaires caractéristiques radiologiques et déterminisme du processus pathogène. Med Buccale Chir Buccale 2010; 16:95-100
5. MATHEW R, OMAMI G, GIANOLI D, LURIE A, Unusual cone beam computed tomography presentation of traumatic (simple) bone cyst: case report and radiographic analysis. Oral Surg Oral Med Oral Pathol Oral Radiol 2012, 113: 410-3.
6. MATSUMARA S, MURAKAMI S, KAKIMOTO N, FURUKAWA S, KISHINO M, ISHIDA T, FUCHIHAT H. Histopathologic and radiologic findings of the simple bone cyst. Oral Surg Med Oral Oral Pathol Oral Radiol Endod 1998;85: 619-25.
7. MILIN C. Kystes solitaires de la mandibule: Diagnostic, évolution et traitement. AOS 2012,260:373-85.
8. PATRIKIOU A, SEPHIRIADOU-MAVROPOULOU T, ZAMBELIS G. Bilateral traumatic bone cyst of the mandibule. A case report. Oral Surg Oral Med Oral Pathol 1981; 51(2):131-3.
9. SAITO Y, HOSHINA Y, NAGAMINE T, NAKAJIMA T, et al. Simple bone cyst. A clinical and histopathologic study of fifteen cases. Oral Surg Oral Med Oral Pathol 1998; 74 (4):487-91.
10. SUOMALEINEN A, APAJALAHTI S, KUHLEFELT M, HAGSTRÖM J. Simple bone cyst: a radiologic dilemma. Dentomaxillofacial Radiol. 2009; 38:174-7.

Bellaiche-Norbert-Sictmieux

NORBERT BELLAICHE
– Médecin radiologue
– Auteur du Guide pratique du Cone Beam en imagerie dento-maxillaire

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4 commentaires au sujet de “Dans la peau du radiologue – Cas n°3 : Un kyste asymptomatique chez une jeune adolescente

  1. Lanto RAKOTONIRAINY.

    Bonjour,
    je dirai que c’est un kyste épidermoïde , pas d’origine endodontique puisque les vitalité pulpaires sont conservées.
    Il faut réaliser une énucléation et curetage puis un traitement endodontique des dents concernées.
    Cordialement,

  2. Mihai SANDULESCU.

    I would say it is Periapical Cemental Dysplasia, in its first stage, although the buccal plate seems deformed. Since the teeth are vital, I would say no treatment. Just keep the patient under observation to see if it changes in volume.

  3. Paul MATHURIN.

    image radioclaire uniloculaire bien limitée sans liseré de condensation périphérique occupait la région symphysaire. Elle s’étendait sur la région antérieure de la 32 à la 42. La limite supérieure de la lésion présentait des digitations en regard des apex des incisives avec amincissement de la corticale buccal.
    La lésion la plus probable étant donné l’age est kyste solitaire ( kyste traumatique dans l’ancienne nomenclature).
    Traitement: curetage de la lésion et analyse histopathologique pour confirmé le tout

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