Billet d’humeur : fraude à la sécurité sociale

Par Gérard BAROUHIEL le 12-09-2018

Je suis de bonne humeur.

Je rentre de vacances, ma collaboratrice est restée au cabinet pendant le mois d’août. Nous faisons le point ensemble, pas de catastrophe à déplorer, les patients à qui j’avais donné un rendez-vous pour septembre sont tous venus en début de mois. Tout va bien au cabinet, ça veut dire que je suis de “bonne humeur professionnelle”.

Ma collaboratrice, durant le mois d’août, a soigné divers patients CMU, comme nous le faisons régulièrement durant l’année. Parmi ces patients, une famille a attiré notre attention quant à son comportement. Voici les faits relatés en trois actes :

ACTE I

M. F. prend rendez-vous par téléphone, il a des soins à faire et une couronne sur la 14, il se déclare pris en charge par la CMU, il sait pertinemment que tout est pris en charge et qu’il n’aura rien à régler.

Toutefois, le praticien lui fait un devis de 100€ pour la dent provisoire non prise en charge par la CMU.
Le patient s’acquitte volontiers de cette somme en sortant une liasse volumineuse de billets de 100€ pour en extirper un exemplaire et le donner au praticien.

Après réalisation des soins et de la couronne, le praticien n’est toujours pas remboursé à ce jour. En effet, à cause d’un problème de changement de centre de sécurité sociale, le dossier de remboursement est en attente.

ACTE II

L’épouse de M. F. prend rendez-vous au cours de ce même mois d’août pour elle et son fils de 6 ans. Une heure est réservée pour la patiente et son fils.
Cependant, Mme F. n’honore pas son rendez-vous, et ce sans prévenir.

Elle reprend rendez-vous quelques jours plus tard, mais cette fois-ci, il ne lui est réservé qu’une demi-heure.
Elle arrive au rendez-vous avec 15 minutes de retard avec l’excuse suivante : “Ce n’est pas de ma faute, c’est le taxi qui était en retard !”
Le praticien l’informe qu’il pourra soigner soit la mère, soit l’enfant, mais pas les deux lors de ce rendez-vous.
Soit, c’est la mère qui se fait soigner.

A la fin de la séance, elle descend du cabinet, suivi du regard par l’assistante, elle rentre s’acheter un sandwich et reprend le VTC qui l’avait amenée au cabinet et qui l’attendait (!!) pour la ramener sans doute chez elle !

ACTE III

L’assistante reçoit le jour même un appel incendiaire de M. F. lui disant que son épouse avait été traitée de façon inadmissible, et qu’il ne comprenait pas pourquoi nous avions refusé de soigner son enfant. Je vous laisse imaginer la façon dont l’assistante a répondu.

L’état distribue, bon an mal an, environ 750 milliards d’euros de prestations sociales, y compris les frais de gestion.
Il y a 6 catégories de prestations : la vieillesse-survie, la santé, la maternité-famille, l’emploi, le logement et la pauvreté-exclusion sociale.
La sécurité sociale finance les 2/3 de ces organismes.
Il n’est pas question de remettre en question l’esprit de ses actions, c’est la fierté de la France qui a su de tout temps accueillir, soigner, protéger.
La fraude aux prestations sociales a atteint 546 millions d’euros en 2016 !
Cette fraude porte entre autres domaines sur l’obtention des droits, les fausses déclarations, les faux documents en tout genre (fausses fiches de paie pour obtenir le chômage, dissimulation de ressources), sans oublier la fraude à la nomenclature des professionnels de santé.
Les services de l’état commencent seulement, depuis peu d’années, à lutter efficacement contre la fraude – fraude que nous finançons en partie, vous et moi, par prélèvements de l’URSSAF tous les 15 du mois !

Épilogue

Lorsqu’un praticien collaborateur réalise une prothèse au titre de la CMU, il doit payer le laboratoire de prothèse, ses frais personnels, et rétrocéder 40% au praticien titulaire. Par conséquent, il lui reste environ 60€. Nous avons convenu avec ma collaboratrice qu’elle ne me rétrocède pas d’honoraires sur les prothèses CMU.

Très bonne rentrée à tous.

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