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Traitement d’une récession gingivale importante en 41

Parodontologie Par Jonathan SEMTOB le 13-12-2022

 

Améliorer l’esthétique, supprimer des hypersensibilités dentinaires et limiter un risque de progression sont les principales indications du traitement des récessions tissulaires marginales.

Le recouvrement radiculaire est recherché après chirurgie, mais aussi la transformation d’un phénotype fin vers un phénotype plus épais, pour augmenter la résistance de la gencive marginale aux microtraumatismes.

 

fig-01-recessions-gingivales-semtobFig. 01 : situation pré-opératoire, vue vestibulaire. Récession de classe II de Miller en 41.

 

fig-02-recessions-gingivales-semtobFig. 02 : situation pré-opératoire, vue occlusale. Phénotype gingival fin, racine de 41 proéminente.

 

Dans notre vidéo, un tunnel fermé latéralement est utilisé pour traiter une récession profonde en 41(1). Cette technique a été décrite pour diminuer les risques de complications liées à l’anatomie des récessions unitaires profondes mandibulaires, notamment un vestibule peu profond.

 

Technique chirurgicale

Après anesthésie locale, la racine exposée est surfacée à la curette de Gracey 11/12. Le sulcus est légèrement incisé à la lame 15c puis une tunnelisation d’épaisseur totale est réalisée à la curette de Gracey 11/12 jusqu’à la ligne de jonction muco-gingivale, apicalement à la récession ainsi qu’en mésial et distal. Le tunnel est ensuite mobilisé au-delà de la ligne de jonction muco-gingivale, en épaisseur partielle, à la curette de Gracey 11/12 et à la lame 15c. Les muscles et fibres de collagène sont relâchés avec ces instruments jusqu’à la fermeture passive des berges mésiale et distale sur la récession. Aussi la base des papilles est désinsérée à la curette de Gracey 11/12.

 

fig-03-recessions-gingivales-semtobFig. 03 : tunnelisation muco-périostée.

 

Un greffon épithélio-conjonctif est ensuite prélevé en palatin des dents 24 à 26 avec une lame 15. Il présente une épaisseur d’environ 2 mm. Une gaze hémostatique résorbable (Oxitamp®) est placée sur le site donneur et stabilisée par des points de matelassier (Polyglécaprone 5/0, Advantime®).

 

fig-04-recessions-gingivales-semtobFig. 04 : palais postérieur et latéral, site donneur. Gaze hémostatique résorbable stabilisée par des points de matelassier.

 

Un composite fluide est appliqué sur la gaze et les sutures afin de réduire les sensibilités post-opératoires.

 

fig-05-recessions-gingivales-semtobFig. 05 : composite fluide collé aux sutures.

 

L’épithélium et le tissu adipeux sont excisés à la lame 15, sur une compresse imbibée de sérum physiologique. Le greffon conjonctif prend alors une épaisseur de 1-1,5 mm.

 

fig-06-recessions-semtobFig. 06 : prélèvement épithélio-conjonctif désépithélialisé.

 

fig-07-recession-gingivale-semtobFig. 07 : prélèvement épithélio-conjonctif désépithélialisé. 1-1,5 mm d’épaisseur.

 

Le conjonctif est inséré et fixé dans le tunnel par des points de matelassier mésial et distal (Polyglécaprone 5/0, Advantime®). Puis il est stabilisé au niveau de la jonction émail-cément (Polyglécaprone 6/0, Advantime®).

 

fig-08-recession-gingivale-semtobFig. 08 : conjonctif avant insertion dans cette position.

 

fig-09-recession-semtobFig. 09 : conjonctif suturé en mésial et distal dans la tunnelisation et en vestibulaire sur la récession en 41.

 

Les berges marginales du tunnel sont suturées d’apical à coronaire par des points simples (Polyfluorure de vinylidène 5/0, Seralene®). Dans notre cas, le conjonctif et la récession sont totalement recouverts. Le lambeau est avancé coronairement et stabilisé par des points suspendus mésial et distal à la récession (Polyfluorure de vinylidène 5/0, Seralene®).

 

fig-10-recession-gingivale-semtobFig. 10 : tunnel fermé latéralement par des points simples. Conjonctif enfoui totalement. Points suspendus.

 

Nous avons prescrit des antibiotiques (Amoxicilline, 2 grammes par jour sur 7 jours) et un anti-inflammatoire (Ibuprofène si nécessaire, sur 2-3 jours). Le brossage du site chirurgical mandibulaire est proscrit pendant 14 jours et un bain de bouche est préconisé 2 fois par jour pendant 14 jours (Chlorhexidine à 0,12 %). À une semaine, les sutures au palais sont déposées et le brossage est repris sur ce secteur. Les sutures du site incisif sont déposées à 14 jours post-opératoires et un brossage avec une technique de rouleau et une brosse à dents à brins coniques doux (Inava Sensibilité®) est demandé.

 

Résultats

La morbidité était faible tant au niveau du site greffé que du site donneur.

 

fig-11-recession-semtobFig. 11 : situation à 15 jours post-opératoires, cicatrisation de seconde intention habituelle.

 

À 15 jours, une contraction du lambeau semblait ouvrir les berges latérales à la récession au niveau cervical. De fait, le greffon et la racine se retrouvaient partiellement exposés.

 

15 jours post-opératoireFig. 12 : situation à 15 jours post-opératoires, conjonctif partiellement exposé, cicatrisation de seconde intention.

 

La profondeur de la récession initiale de 5,5 mm diminuait à 0,8 mm à 1 mois. Le recouvrement radiculaire était de 85 %. La hauteur de tissu kératinisé initiale de 0 mm augmentait à 4,5 mm à 1 mois et le phénotype gingival apparaissait épaissi.

 

1 mois post-opératoireFig. 13 : situation à 1 mois post-opératoire, recouvrement radiculaire partiel.

 

1 mois post-opératoireFig. 14 : situation à 1 mois post-opératoire, phénotype gingival épaissi.

 

fig-15-semtobFig. 15 : situation à 6 mois post-opératoires. Recouvrement stable malgré un contrôle de plaque dentaire perfectible (photographie prise après détartrage).

 

À 6 mois post-opératoires, le recouvrement et l’épaississement restaient stables.

fig-16-semtobFig. 16 : situation à 6 mois post-opératoires, l’épaisseur phénotypique reste stable.

 

Discussion

Certains critères cliniques peuvent avoir une influence sur le choix d’une technique de recouvrement et son résultat : l’étendue des surfaces avasculaires et du lit périosté, le phénotype, la hauteur de tissu kératinisé, les racines proéminentes, les proximités radiculaires, la profondeur de sondage parodontal, la perte interproximale en os et tissus mous. Ces caractéristiques varient selon le site anatomique et chez les patients traités par orthodontie, il semble que les incisives mandibulaires soient plus susceptibles de développer des récessions(2).

L’association d’une greffe de tissu conjonctif à un lambeau avancé coronairement est la technique de référence des recouvrements radiculaires(3). Néanmoins, des récessions unitaires profondes du secteur incisif mandibulaire peuvent s’avérer difficiles à traiter par cette technique quand le vestibule est déjà peu profond. Le tunnel fermé latéralement est une technique adaptée pour traiter ce genre de défaut. En effet, les recouvrements radiculaires obtenus sont satisfaisants et la profondeur de vestibule post-opératoire ainsi que le phénotype plus épais favorisent la stabilité de la gencive marginale(1).

 

Conclusion

Les données de la littérature scientifique sur ce type de défaut s’avèrent insuffisantes pour définir une technique de référence. Dans notre cas, aucun dérivé de la matrice amélaire n’a été utilisé contrairement à la technique originale(1). Aussi, l’importance de recouvrir totalement le greffon pour obtenir un recouvrement complet reste controversée(1, 4).
Des études dédiées aux différentes situations à risque anatomique restent nécessaires pour améliorer la prévisibilité du traitement chirurgical des récessions unitaires profondes mandibulaires.

 

Références bibliographiques

(1) Sculean A., Allen EP. – The Laterally Closed Tunnel for the Treatment of Deep Isolated Mandibular Recessions: Surgical Technique and a Report of 24 Cases.
Int J Periodontics Restorative Dent 2018;38(4):479-487.

(2) Renkema AM., Fudalej PS., Renkema AA., Abbas F., Bronkhorst E., Katsaros C. – Gingival labial recessions in orthodontically treated and untreated individuals: A case-control study.
J Clin Periodontol 2013;40:631–637.

(3) Cairo F., Pagliaro U., Nieri, M. – Treatment of gingival recession with coronally advanced flap procedures. A systematic review.
J Clin Periodontol 2008;35 (Suppl. 8), 136–162.

(4) Zucchelli G., Marzadori M., Mounssif I., Mazzotti C., Stefanini M. – Coronally advanced flap + connective tissue graft techniques for the treatment of deep gingival recession in the lower incisors. A controlled randomized clinical trial.
J Clin Periodontol 2014;41:806–813.

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