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CODEX MAYA : la dentisterie cosmétique d’hier, d’aujourd’hui et de demain

Actualité Par Yassine Harichane le 13-03-2021

Introduction

Le Mexique possède une incroyable richesse touristique, gastronomique et surtout historique avec les civilisations précolombiennes. La civilisation maya est surtout connue grâce aux ruines du Yucatan. Les pyramides mayas ne sont pas juste un tas de pierres, c’est un véritable alignement astronomique. À Chichen Itza, le temple de Kukulcán comporte 365 marches pour chaque jour de l’année, et l’orientation est telle que lors du solstice, l’ombre des marches dessine un serpent qui descend la pyramide. Cet effet d’optique préfigure l’arrivée du dieu serpent à plumes Kukulcán.

Les Mayas avaient également un haut degré de sophistication dans l’art : statues, vases, masques mortuaires, bijoux… En plus des sciences et des arts, ils ont su puiser toute la quintessence de la faune et la flore pour élaborer une pharmacopée utile en médecine maya. La dentisterie n’a pas été éclipsée car leur maîtrise de la sphère crânio-faciale est impressionnante.

 

Orthopédie crânio-faciale maya

En observant les représentations humaines mayas, on remarque que le profil présente des caractéristiques particulières : crâne de forme ovoïde, nez allongé, front fuyant, angle nasofrontal ouvert… La raison est simple : les Mayas ont appliqué chez leurs enfants, dès leur plus jeune âge, des plaques rigides pour diriger la croissance crânienne et donner une forme spécifique à la tête. Cette pratique s’apparente à de l’orthopédie crânio-faciale à des fins purement cosmétiques. Cette déformation volontaire a été faite dans un but d’appartenance ethnique et d’identité individuelle.

Les Mayas étonnent par leur savoir anatomique car ils connaissaient l’existence des fontanelles. Ceci s’explique par leurs pratiques funéraires où les corps de leurs morts sont manipulés pour faire des modifications post-mortem. Cette tradition séculaire leur a permis d’étudier de près l’anatomie humaine, ce qui explique leur maîtrise en cardiectomie.

 

Orthopédie crânio-faciale maya.

 

Dentisterie maya

Si la croissance crânio-faciale était maitrisée par les Mayas, on peut facilement deviner que la dentisterie était accessible pour eux. Pour preuve, on retrouve sur les restes humains mayas des modifications dentaires multiples et variées allant de la simple réduction du bord incisif à la combinaison complexe d’améloplastie et d’incrustation de pierres précieuses. Ces modifications dentaires concernent généralement la face vestibulaire des dents antérieures maxillaires. Comme pour l’orthopédie crânio-faciale, ces modifications dentaires ont un but ornemental. Elles font partie intégrante de la vie de l’individu et suivent une tradition culturelle. Ces bijoux dentaires ont traversé le temps et l’espace, si bien que 1500 ans plus tard, ils sont toujours en bouche, ou plutôt ce qu’il en reste.

 

Dentisterie maya.

 

Codex maya

Toute la culture maya était inscrite dans des ouvrages portant un nom à la fois mystique et mystérieux : le Codex. Malheureusement, avec l’arrivée des conquistadors au XVIè siècle, les prêtres qui les accompagnaient considéraient ces écrits comme sacrilèges. Des autodafés ont détruit à tout jamais une partie des connaissances mayas. Aujourd’hui, il ne nous reste plus que trois codex mayas. Deux d’entre eux sont dans un état de délabrement tel qu’ils ne sont pas manipulables. Le troisième est considéré comme le plus beau, il rapporte les rites associés au calendrier maya. Aucune mention n’est faite de la médecine, de la pharmacologie et de la dentisterie maya.

De nos jours, la dentisterie moderne aide à restaurer le sourire et l’estime de soi chez nos patients. Nos outils technologiques sont si puissants qu’ils peuvent aussi restaurer des artefacts ancestraux. En l’absence de Codex maya, nous utiliserons 4 flux de travail pour ressusciter la dentisterie cosmétique maya.

 

Codex maya.

 

Crâne maya imprimé en 3D

Dans ce premier flux, nous créons un crâne maya. La première étape est l’acquisition d’un crâne au moyen d’un CBCT (iCat FLX V10). Le fichier DICOM obtenu est traité pour ne laisser apparaître que les tissus minéralisés et converti en .STL. Dans un second temps, les modifications crânio-faciales se font virtuellement : aplatissement de l’os frontal, allongement de l’os occipital et étirement des os pariétaux vers le haut, tout en gardant un volume crânien identique. La troisième étape consiste à imprimer en 3D le projet informatique (Solflex 650). Une résine transparente a été utilisée (V-Print ortho) pour obtenir un artefact translucide comme du cristal : un crâne maya imprimé en 3D.

De nos jours, cette technologie permet aux orthodontistes et chirurgiens maxillo-faciaux de travailler sur leurs cas cliniques en effectuant des simulations allant de la simple visualisation 3D sur un ordinateur à un objet imprimé en 3D.

 

Crâne maya imprimé en 3D.

 

Arcade dentaire maya imprimée en 3D

Avec le deuxième flux de travail, nous reconstruisons une arcade dentaire maya. La première étape passe par une empreinte optique. L’arcade numérisée est exportée au format .STL pour créer une base au modèle. Le fichier est envoyé à l’imprimante 3D et imprimé dans une teinte proche du Vita A2. Le maquillage est effectué avec du composite fluide. La gencive est reproduite avec un composite rose. Les incrustations de pierres précieuses sont simulées avec du composite coloré. Le résultat final est une arcade maya réaliste avec ses défauts naturels et sa beauté surnaturelle.

Aujourd’hui, le wax-up est une étape indispensable en particulier quand il s’agit d’une réhabilitation globale. La combinaison de la précision numérique avec la dextérité manuelle offre un outil primordial avant toute intervention invasive.

 

Arcade dentaire maya imprimée en 3D.

 

Wax-up maya imprimé en 3D

Dans le troisième flux de travail, un mock-up maya est créé à partir d’un wax-up maya. La phase initiale reste la même, l’acquisition d’une arcade dentaire au moyen d’un scanner intra-oral. L’empreinte numérique est envoyée à un prothésiste dentaire pour créer virtuellement un wax-up maya : réduction du bord libre des incisives, marche mésiale des centrales, incrustations vestibulaires. Le wax-up est imprimé en 3D. Pour convertir le wax-up en mock-up, une clé en silicone est remplie d’un composite auto-durcissant pour provisoires puis placée en bouche. Le résultat obtenu est fascinant : un sourire maya plus vrai que nature ressuscitant un style cosmétique tombé dans l’oubli.

Le mock-up est un outil du quotidien car il offre au patient la possibilité d’essayer son sourire. Que la demande soit conventionnelle ou inhabituelle, nos outils technologiques répondent voire dépassent les attentes des patients.

 

Wax-up maya imprimé en 3D.

 

Mock-up maya imprimé en 3D

Dans ce dernier workflow, le mock-up est directement imprimé en 3D. Dans la réalisation précédente, le mock-up présente deux inconvénients majeurs : une mise en œuvre longue et fastidieuse, et la nécessité de détruire le mock-up pour le retirer. Une fois de plus, la technologie offre une alternative intéressante. À partir d’une empreinte optique, le prothésiste dentaire peut concevoir un mock-up numérique imprimable en 3D.

Dans le cas du sourire maya, nous avons d’abord imprimé la maquette puis réalisé un maquillage. Le mock-up est ensuite inséré en bouche en une seconde avec une facilité déconcertante. Il peut être retiré tout aussi facilement et réutilisé plus tard.

L’impression 3D d’un mock-up est désormais possible. La technologie montre tout son potentiel avec la finesse de la résine imprimée en 3D alliée avec la précision informatique. Le résultat est un véritable bijou dentaire, la quintessence de la dentisterie cosmétique.

 

Mock-up maya imprimé en 3D.

 

Conclusion

Les Mayas ont montré leur suprématie en dentisterie en effectuant des procédures dentaires qui ont traversé les âges. Même si les canons esthétiques ne sont pas applicables à notre société actuelle, il est clair que leur maîtrise technique et biologique a abouti à un résultat fascinant. La dentisterie cosmétique trouve sa source en Amérique centrale il y a plus de 1 500 ans.

Plutôt que de tomber dans l’oubli, la dentisterie maya a été ressuscitée grâce à nos outils technologiques actuels. En suivant 4 étapes simples : numériser, concevoir, imprimer, exécuter, il a été possible de créer des artefacts réalistes. Ce flux de travail applicable à la dentisterie moderne prouve qu’il est possible de réaliser des restaurations dentaires naturelles et précises. Peut-être que le sourire de nos patients traversera le temps tout comme le sourire des Mayas.

 

Références bibliographiques

Mayan esthetic dentistry. Harichane Y. Compend Contin Educ Dent 2020;41(7)e8e13

Von den Maya inspiriert -Schädel- und Gebiss Rekonstruktion mit 3D-Druck. Harichane Y. Cosmetic Dentistry Germany 2021(1):10-15

 

Déclaration

L’auteur déclare l’absence de conflit d’intérêts.

 

Remerciements

L’auteur félicite Jonathan Pellerin (Laboratoire Dentaire de la Mauricie, Canada) pour ses talents techniques et artistiques. L’auteur tient à remercier Silvia Jarchow, Reinhard Buch, Frédéric Goudezeune (Voco), Jean-François Coblentz (Blue d’IS) et le Dr Carlos Sfeir pour leur soutien amical et matériel.

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