L’organisation de la transmission de votre cabinet dentaire
Gestion du cabinet Par Julien Fraysse le 10-12-2024La transmission d’un cabinet dentaire est une étape cruciale dans la carrière d’un chirurgien-dentiste, où se mêlent enjeux personnels, économiques et fiscaux. Elle se distingue des transmissions d’entreprises classiques par des problématiques spécifiques liées à la patientèle, aux valeurs professionnelles et à la complexité juridique.
Cet article vous guide sur les bonnes pratiques pour préparer sereinement la transmission de votre cabinet, tout en optimisant les aspects fiscaux et financiers de l’opération.
Pourquoi anticiper est essentiel ?
De nombreux praticiens repoussent la préparation de leur transmission, par manque de temps ou de visibilité sur l’avenir. Toutefois, une transmission mal préparée engendre des risques de précipitation qui peuvent nuire à la valorisation du cabinet et complexifier le transfert des responsabilités. En s’y prenant plusieurs années à l’avance, vous disposez d’une marge de manœuvre pour bien choisir votre successeur, optimiser la fiscalité, et organiser le passage de relais en douceur avec la patientèle.
Le choix d’un successeur : une étape clé
Le choix du repreneur est décisif pour garantir la continuité des soins et assurer la pérennité de votre cabinet. Parmi les options les plus fréquentes figure la collaboration libérale : elle permet d’introduire un jeune praticien dans le cabinet, facilitant ainsi une passation progressive des responsabilités.
En fonction de l’emplacement de votre cabinet, trouver un collaborateur libéral peut s’avérer plus ou moins complexe, mais cette démarche reste l’une des plus efficaces pour initier un potentiel successeur.
Structurer juridiquement votre cabinet pour une transmission facilitée
La transmission d’un cabinet dentaire repose aussi sur le choix de la structure juridique, qui peut grandement simplifier le transfert tout en minimisant les charges fiscales.
Deux structures sont particulièrement adaptées à cet effet :
• Société d’Exercice Libéral (SEL) : en cédant votre patientèle et votre matériel à une SEL créée avec votre futur successeur, vous pouvez organiser un transfert progressif, minimisant ainsi les besoins d’endettement du repreneur et rassurant vos patients et votre équipe.
• Société de Participations Financières de Profession Libérale (SPFPL) : si vous êtes déjà associé d’une SEL, la constitution d’une SPFPL avec votre successeur peut s’avérer stratégique pour optimiser la fiscalité de la reprise et transmettre en douceur.
Ces structures offrent une flexibilité et un cadre fiscal avantageux, avec une imposition réduite et une protection contre la double taxation, notamment grâce au régime « mère-fille », qui permet à la holding de percevoir des dividendes de la SEL à un coût fiscal minimal.
Les dispositifs d’exonération des plus-values pour le départ à la retraite
Dans le cadre d’une cession liée à un départ à la retraite, le Code Général des Impôts (CGI) prévoit deux dispositifs d’exonération partielle ou totale des plus-values pour les chirurgiens-dentistes :
• Article 238 quindecies du CGI : ce dispositif, souvent surnommé « Sarkozy », permet une exonération totale ou partielle des plus-values pour les cabinets selon que la valeur du fonds libéral dépasse ou pas 500 000 euros. Il est particulièrement adapté aux cabinets de petite et moyenne taille, offrant ainsi une solution fiscale favorable à la majorité des praticiens qui partent à la retraite.
• Article 150-O D ter du CGI : vous avez été gérant de votre SELARL, Président de votre SELAS pendant au moins 5 ans, vous pourrez bénéficier d’un abattement de 500 000 euros sur le montant de la plus-value dégagée lors de la vente de vos titres. Cette déduction forfaitaire ne s’applique pas sur le calcul des prélèvements sociaux dus lors de la cession.
Dans un contexte fiscal et social particulièrement mouvant, il vous faudra être vigilant sur les conditions à respecter pour bénéficier de ces exonérations, dont le périmètre et les montants sont susceptibles de varier fortement.
Vous devrez en outre toujours dissocier les exonérations portant sur l’impôt (impôt sur le revenu, Impôt sur les sociétés) de celles potentiellement applicables aux prélèvements sociaux (CSG-CRDS).
Transmission sociale : préserver l’équipe en place
Le transfert de propriété d’un cabinet dentaire implique également la reprise des contrats de travail de l’équipe. L’article L1224-1 du Code du travail stipule que tous les contrats en cours subsistent entre le repreneur et le personnel. Cela inclut la reprise de l’ancienneté, ce qui permet aux collaborateurs de conserver leurs avantages sociaux et professionnels. Ce point est souvent négligé, mais il est essentiel pour maintenir une bonne dynamique d’équipe et rassurer la patientèle, qui restera en contact avec les mêmes interlocuteurs.
Le pacte d’associé : anticiper les modalités de sortie
Dans le cas d’une transmission progressive ou d’une association au sein d’une SEL, il est recommandé de définir un pacte d’associé. Ce pacte fixe les conditions de sortie du cédant et encadre les droits et devoirs de chaque partie. Il sert aussi de guide pour assurer une passation harmonieuse, en posant des règles claires pour le retrait du cédant et l’accession du repreneur. C’est un document stratégique, garant de la stabilité de la transition.
Optimiser la fiscalité des dividendes pour le repreneur
Pour les chirurgiens-dentistes souhaitant céder leur cabinet tout en soutenant leur successeur, le régime fiscal dit « mère-fille » offre des avantages importants. En effet, grâce à ce régime, une holding (par exemple, une SPFPL) peut recevoir des dividendes de la SEL sans double imposition. Seule une quote-part de frais et charges (généralement 5 %) est imposée, permettant ainsi de remonter des fonds à la holding à moindre coût.
Les étapes d’une transmission réussie
En résumé, pour qu’une transmission soit une réussite, voici les principales étapes à suivre :
• Préparation de la cession (2 à 5 ans avant) : commencez par évaluer la valeur de votre cabinet, réfléchissez à votre projet de transmission, et anticipez les aspects fiscaux et juridiques.
• Choix d’un successeur : déterminez si vous souhaitez passer par une collaboration libérale, une SEL, ou une SPFPL. Cela facilitera une transition progressive.
• Formalisation juridique et fiscale : ayez recours au service d’un expert pour vous conseiller sur la structuration la plus avantageuse en fonction de votre situation et de vos objectifs.
• Finalisation du pacte d’associé : rédigez un pacte d’associé si vous optez pour une transmission progressive, afin de clarifier les modalités d’entrée et de sortie.
• Accompagnement du repreneur : assistez votre successeur dans la prise en main des responsabilités, tout en assurant une continuité auprès de la patientèle et de l’équipe.
Conclusion
La transmission d’un cabinet dentaire ne s’improvise pas et doit être envisagée comme un projet à long terme. En planifiant chaque étape, en optimisant les aspects fiscaux et en prenant le temps de bien choisir votre successeur, vous maximisez vos chances de céder sereinement votre cabinet, tout en valorisant votre travail et en assurant la continuité des soins pour vos patients.
Un accompagnement par un professionnel spécialisé en transmission de cabinets médicaux et dentaires est fortement recommandé pour éviter les écueils et bénéficier de tous les avantages fiscaux disponibles.
Chaque étape de la transmission est une occasion de préparer l’avenir du cabinet et de garantir à votre successeur toutes les chances de réussite dans sa reprise.
Dentairement vôtre
Julien Fraysse
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