Accueil >
Se former
> Formation continue >
Vignette-Site-Article-Alexandre-Billon-11-2023

La prothèse composite à l’ère du numérique

Prothèse Par Alexandre BILLON, Axel GUEGO le 21-11-2023

Introduction

Un patient de 61 ans se présente au cabinet pour une mobilité dentaire. Lors de l’anamnèse, nous apprenons que le patient n’a pas de médication, qu’il a un bruxisme nocturne et qu’il a arrêté le tabac depuis 10 ans après avoir fumé pendant 25 ans, 1 paquet/jour soit 365 paquets par an..
Il nous confie ne pas être à l’aise pour manger et souhaite savoir si nous pouvons lui apporter une solution dans un cadre de moyens économiques limités.

 

Lors de la première consultation, la situation initiale était la suivante :
Absence de 14 dents, la 26 présente une mobilité 4 sur l’échelle de Muhlemann. Des caries sur 13, 12, 11, 21, 23 avec des Lésions Inflammatoires Périapicales d’Origine Endodontique (LIPOE) sur 13, 12, 21.
• Au niveau parodontal, le patient présente une parodontite chronique généralisée, stade 3 grade B, selon la classification de Chicago.
• Au niveau occlusal, les courbes sont perturbées et le guidage antérieur est dysfonctionnel.
• La musculature du patient est forte, associée à un bruxisme, mais aucune dysfonction des ATM. On note que la DV est bonne.
Deux appareils amovibles partiels ont été réalisés, mais n’entrent pas en occlusion.

 

Des photographies intra-buccales sont réalisées ainsi qu’une empreinte numérique bi-maxillaire (scanner intra-oral i500, Medit) et un bilan radiographique. Ces données acquises vont nous permettre de réaliser une étude fonctionnelle et esthétique pour proposer le plan de traitement idéal au patient.

 

Image-1-Cas-clinique-Alexandre-Billon-Prothese-numeriqueFig. 01 : bilan pré-opératoire, photographies intra-orales et radiographie panoramique.

 

Les conclusions de l’analyse des données nous orientent vers le plan de traitement suivant :
1 – Extraction de 26 avec réalisation de deux appareils amovibles partiels provisoires
2 – Thérapeutique étiologique parodontale avec enseignement de l’hygiène,
détartrage et surfaçage
3 – Bridge maxillaire (13 à 23) céramo-métallique avec attachements et prothèse amovible
partielle maxillaire et mandibulaire.

 

Étapes du plan de traitement

 

Phase d’assainissement

La première étape consiste en l’extraction de 26 et la pose d’appareils transitoires amovibles, maxillaire et mandibulaire. Ce premier jeu d’appareils amovibles aura pour but de recréer un calage postérieur. Puis, on réalise une séance de surfaçage avec apprentissage des bons gestes d’hygiène (brossage, brossettes).
Le patient est revu pour réaliser les curetages carieux et les traitements endodontiques de 13, 12 et 21.

 

Image-2-Cas-clinique-Alexandre-Billon-Prothese-numeriqueFig. 02 : vue intra-orale des curetages carieux et traitements endodontiques.

 

Provisoire

L’étape suivante est donc la réalisation d’un bridge maxillaire provisoire. Il a été décidé de solidariser les dents pour des raisons parodontales. La ligne du sourire du patient étant basse et pour faciliter le contrôle de l’hygiène, les limites de préparations sont juxta gingivales.
Après préparation, on se rend compte que la 13 n’a pas assez de dentine résiduelle, le risque de décollement du moignon composite étant trop important à cause des forces de cisaillement, on prend la décision de le déposer et réaliser un inlay-core.

 

Image-3-Cas-clinique-Alexandre-BillonFig. 03 : étapes de réalisations des préparations périphériques.

 

À la fin de cette séance, une empreinte est réalisée ainsi qu’un bridge provisoire en bis-acryl à partir d’une clé. À 15 jours, l’inlay-core ainsi que le bridge provisoire de laboratoire sont mis en place. L’importance de ce provisoire est aussi d’évaluer l’esthétique, on note ici qu’il faudra allonger les deux centrales sur le bridge d’usage pour un résultat optimal.

 

Image-4-Cas-clinique-Alexandre-BillonFig. 04 : vues intra et extra-orale du bridge provisoire antérieur maxillaire.

 

Le patient est laissé trois mois avec ses prothèses provisoires pour vérifier la bonne cicatrisation osseuse et muqueuse.

 

Prothèses d’usage

Prise d’empreinte et photographie
Le patient est revu pour la séance d’empreinte. Il nous relate avoir été très à l’aise depuis la mise en place des provisoires (amovibles et fixe) et n’a eu aucune gêne ces trois derniers mois. On réalise alors une empreinte numérique pré-opératoire avec les prothèses en bouche pour fixer l’occlusion et la Dimension Verticale d’Occlusion (DVO).
Les appareils provisoires sont déposés ainsi que le bridge provisoire. Des fils de rétractions sont placés et une empreinte numérique des préparations périphériques est réalisée (scanner intra-oral i500, Medit).
La dépression muqueuse des secteurs édentés ne pouvant être capturée par la caméra intra-orale, on réalise une empreinte à l’alginate à l’aide d’un porte-empreinte individualisé.

 

Image-5-Cas-clinique-Alexandre-BillonFig. 05 : vue intra-orale des préparations périphériques et de l’empreinte numérique.

 

Image-6-Cas-clinique-Alexandre-Billon-Prothese-numerique
Fig. 06 : empreinte alginate maxillaire.

 

Partie laboratoire
Au laboratoire, l’empreinte à l’alginate va être scannée (scanner de table, Serie E, 3Shape). On utilisera donc deux empreintes que l’on fusionnera, celle de l’alginate numérisé pour les secteurs édentés et l’empreinte intra-orale des préparations fixes.

 

Image-7-Cas-clinique-Alexandre-BillonFig. 07 : séparation et fusion des différentes empreintes. En gris, empreinte intra-orale de la médit i500 et en jaune, l’empreinte alginate numérisée.

 

Toute la conception de l’armature du bridge, du châssis métallique et des dents prothétiques, est réalisée sur ordinateur puis les différentes pièces sont usinées. Le système d’attachement OT Equator (Rhein83) a été utilisé. Le montage des dents du châssis et la stratification céramique du bridge sont alors réalisés à la main.

 

Image-8-Cas-clinique-Alexandre-BillonFig. 08 : vue du bridge céramo-métallique avec attachements et des prothèses amovibles métalliques.

 

Essayage et livraison

La séance débute par un essayage. La passivité du bridge ainsi que la bonne adaptation du stellite y sont testées grâce à un Fit Checker Advanced (GC). L’occlusion postérieure est vérifiée avec un papier articulé de 200μm d’épaisseur.

 

Image-9-Cas-clinique-Alexandre-BillonFig. 09 : essayage des pièces prothétiques.

 

Image-10-Cas-clinique-Alexandre-BillonFig. 10 : vérification de l’occlusion.

 

Le bridge est alors scellé au Fuji 1 (GC). Le passage de brossette est vérifié et montré au patient.

 

Image-11-Cas-clinique-Alexandre-Billon-BrossettesFig. 11 : vue intra-orale après scellement et démonstration du passage de brossettes.

 

Une gouttière de bruxisme nocturne est ensuite donnée au patient.

 

Image-12-Cas-clinique-Alexandre-Billon-Prothese-numeriqueFig. 12 : essayage et livraison d’une gouttière de désocclusion.

 

Le patient est revu en contrôle à une semaine, on note l’amélioration esthétique comparé aux provisoires grâce à l’allongement des incisives centrales.

 

Image-13-Cas-clinique-Alexandre-Billon-Prothese-numeriqueFig. 13 : vue extra-orale, à gauche avec le bridge provisoire, à droite avec le bridge d’usage.

 

Suivi et maintenance

Les facteurs de risques (maladie parodontale et bruxisme) ont bien été expliqués et compris par le patient. Un contrôle à 3 mois, 6 mois et 1 an est alors mis en place. Au cours de ces séances, aucune doléance du patient n’est à signaler.
À un an, le parodonte est toujours stable, le bridge n’a pas de chipping et les gaines sont en bon état.

 

Image-14-Cas-clinique-Alexandre-Billon-Avant-ApresFig. 14 : vue intra-orale pré-opératoire à gauche, au contrôle à 1 an à droite.

 

Conclusion

L’implantologie tend à devenir le traitement de choix dans le cas d’édentements multiples. Cependant, nous ne devons pas oublier ces techniques plus anciennes. La prothèse composite, qui était autrefois très complexe, est devenue plus simple à gérer grâce aux protocoles numériques. La possibilité de mixer deux empreintes permet alors de réaliser les armatures d’une prothèse amovible et d’une prothèse fixée sur un seul modèle, ce qui diminue considérablement le nombre de rendez-vous pour le patient, ainsi que le risque d’erreurs par le praticien ou le prothésiste.

 


 

Cet article a été rédigé par le Dr Alexandre Billon, chirurgien-dentiste et Axel Guego, prothésiste.

FavoriteLoadingAjouter aux favoris Partager à un ami
Partager

Envoyer un commentaire