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Regroupements de cabinets : enjeux et solutions

Juridique Par Julien FRAYSSE le 02-06-2020

De nombreux praticiens font aujourd’hui le choix de l’exercice en groupe. Réaliser des économies d’échelle, mutualiser les coûts, générer des synergies, développer et diversifier son offre de soins sont autant de paramètres, qui poussent les chirurgiens-dentistes au regroupement. L’union fait la force ! Mais cette démarche n’est pas un long fleuve tranquille et pour nombreux d’entre vous, l’indépendance n’a pas de prix.

 

Sur le plan juridique et fiscal, plusieurs techniques permettent de faciliter le regroupement de cabinets, tout dépend du degré de liberté que chacun des praticiens souhaite conserver.

La stratégie la plus simple consiste à vendre ses actifs (patientèle, matériel, stocks) à une structure nouvelle, qui sera le réceptacle de l’ensemble des outils de travail des praticiens. L’avantage principal de ce dispositif résulte du fait qu’une entité neuve, sans passé, donc sans querelle, se trouve à l’origine d’un projet commun crée ex nihilo. L’historien Fernand Braudel ne disait-il pas que seuls les peuples heureux n’ont pas d’histoire ?

Sur le plan financier, chacun des futurs membres est susceptible d’y trouver son compte car via cette opération de vente, il valorisera le patrimoine professionnel qu’il a bâti. Nous savons tous aujourd’hui comme la transmission des cabinets demeure un sujet délicat, la jeune génération étant peu encline à payer au prix fort patientèle et matériel.

Dans le schéma évoqué, tout est fait pour faciliter l’entrée de tiers. En effet, pour payer le prix aux cabinets fondateurs, la nouvelle entité va s’endetter. La valeur des parts sera donc faible, elle correspondra au capital de départ, souvent symbolique. Cette stratégie facilite grandement les opérations de rapprochement car elle rétribue à leur juste valeur les actifs des premiers constituants et minimise l’investissement des nouveaux arrivants.

L’étape de valorisation des cabinets n’est pas à sous-estimer. Elle doit être opérée de la façon la plus neutre possible afin de ne pas froisser les parties prenantes. Il faudra faire preuve de tact et mesure mais aussi de force de persuasion, de sens du compromis, les batailles d’égo et intérêts particuliers étant particulièrement fréquents en la matière. Cette étape est directement corrélée au niveau d’endettement de la future entité. Les besoins de trésorerie de chacun doivent être pris en considération, afin de ne pas asphyxier la « newco » (nouvelle société).

Le résultat de cette opération est une intégration totale des cabinets. Il en résulte un partage des charges et du chiffre d’affaires, donc des résultats. La mutualisation est intégrale. Il faut donc bien connaître au préalable ses compagnons de route ! Le processus doit ainsi être pensé bien en amont dans tous ses aspects : humain, financier, juridique, fiscal, immobilier, opérationnel.

 

Nous constatons par expérience que le volet humain est souvent sous-estimé lors des opérations de rapprochement. Il faut apprendre à travailler ensemble et ceci est valable tant pour les praticiens que pour les assistantes, secrétaires, chacun « débarquant » avec ses certitudes, ses a priori, sa vision des choses.

 

Si les futurs associés exercent actuellement en société, un regroupement « par le haut » pourra être opéré. Il s’agit sur le plan fiscal de la solution la plus efficace. Une société holding pourra coiffer les différentes entités membres et assurer une unité de direction. Le degré de participation de la holding dans les sociétés filiales traduira le degré de contrôle de celle-là sur les cabinets membres. Nous retrouvons grosso modo les mêmes avantages et inconvénients que dans le premier schéma évoqué.

 

Si vous ne souhaitez pas parvenir à un tel niveau d’intégration et voulez conserver votre indépendance d’activité, la société civile de moyens reste une alternative à envisager. Couplée à un passage en société par voie de cession, elle permet aux membres de dégager de la trésorerie pour se refinancer tout en mutualisant leur outil de travail. Mais il n’y a pas que des opérations réalisées à titre onéreux, qui permettent le regroupement de cabinets dentaires.

Les incertitudes du moment peuvent refroidir certains praticiens pourtant enclins à la fusion. L’endettement, même s’il peut être calibré, est toujours un défi à relever. Il présente néanmoins un avantage indéniable : il pousse les professionnels à œuvrer dans le même sens et évite bien des tergiversations. Certains diront que c’est un stimulant. Les cabinets sous LBO (sous rachat) doivent générer un cash suffisant pour permettre de rembourser la dette senior (l’emprunt de rachat) et faire vivre tous les acteurs.

 

A contrario, la technique de l’apport ne crée pas de passif supplémentaire. Chaque cabinet apporte l’intégralité de ce qu’il possède sans générer de dette. Les fondateurs ne touchent pas d’argent mais ils seront amenés à détenir la majorité du capital de l’entité nouvellement constituée. Là aussi, la valorisation demeure cruciale, afin de ne pas fausser le socle de départ, le pacte fondateur. Le point faible de cette démarche est que les entrants devront payer un droit d’entrée pour indemniser les cabinets originels.

Comme nous l’avons évoqué supra, lorsqu’il y avait vente, la mise de départ exigée pour les nouveaux associés demeure bien inférieure en raison de l’endettement de l’entité créée. Même si les praticiens contribuent tous à payer le coût d’acquisition des anciennes structures, l’endettement est indirectement porté, contrairement au schéma de l’apport où c’est l’individu qui s’endette pour racheter des parts de société.

L’articulation des flux est plus complexe, que le nouvel entrant créée sa propre société holding ou rachète en nom propre des parts de sociétés. C’est grâce au résultat de la société opérationnelle qu’il pourra rembourser son emprunt, il dépendra donc d’une certaine manière des décisions de ses associés. Un pacte d’actionnaire devra donc être établi pour sécuriser les remontées de dividendes, garants des remboursements d’emprunt.
Comme vous pouvez le constater, les conséquences de ces différentes stratégies ne sont pas neutres que ce soit à court terme ou à long terme.

 

Avant de vous lancer dans une opération de rapprochement, vous devrez vous poser les questions suivantes :

• Quelles sont les forces et faiblesses de mon cabinet ?
• Quelles sont mes principales motivations ? Dégager du cash, entamer un processus de transmission, alléger mes frais fixes, ne pas rester isolé, …
• Quel est mon intérêt dans une telle démarche ?
• Vais-je pouvoir trouver ma place dans ce nouvel ensemble ?
• Quelles seront mes marges de manœuvre une fois associé à mes confrères ?
• Si le rapprochement échoue, comment rebondir ?

 

Le sens de l’anticipation ainsi que la connaissance de soi et des autres sont indispensables à la réussite de la démarche. On ne peut pas réussir seul un projet de regroupement. C’est un travail d’équipe, qui doit être murement réfléchi en amont.

Dentairement votre.
Julien Fraysse

 

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Pour en savoir plus, rendez-vous sur le site de Julien Fraysse !

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